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Edem Ntsukpui, le slameur à la verve lumineuse

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Edem Ntsukpui

Le slam, un art oratoire poétique spécifique en son genre, n’apparaîtra que dans les années 1990, et plus particulièrement en 1995 mêlant poètes et « performeurs ». C’est donc une aubaine qui incite divers poètes à déclamer leurs textes dans un mouvement rythmique par lequel ils exercent leur pouvoir enchanteur sur le public.

Ayant soufflé aussi sur le Togo, le vent du slam a balayé et emballé sur son passage ses « élus » dont le jeune talentueux Edem Ntsukpui. Lui, qui s’est révélé au grand public avec son ” Entrée sur scène ” a fait ses premiers pas loin des projecteurs.

Dans cet entretien, l’homme nous révèle son début, son parcours ainsi que ses objectifs.

Entretien exclusif avec Edem Ntsukpui, jeune slameur tombé dans la marmite du slam sous le feu de la poésie.

 

L-frii l’entreprenant : Bonjour,  présentez-vous et dites-nous en quelques lignes quand, et comment vous êtes venu au Slam ?

Je suis Edem NTSUKPUI, slameur togolais, organisateur de scènes Slam et animateur d’ateliers d’écritures. En effet, en 2008, suite au décès de mon père, j’ai commencé à écrire. La même année, j’ai écouté sur une radio de la place un “enregistrement slam”. J’ai donc compris que j’en pouvais faire autant avec les quelques textes que je venais d’écrire. J’ai donc appris ces textes et me disais déjà slameur. Et en mars 2009, j’ai appris qu’il devait se tenir à l’ancien Centre Culturel Français de Lomé une scène ouverte de Slam. C’était la toute première du genre. Je me suis présenté à cette scène, me suis inscrit auprès des organisateurs et, mon tour arrivé, suis passé sur scène. C’était ma toute première scène et c’est de là que l’aventure est partie.

 

Un petit exercice pour commencer. Je vais vous donner quelques mots pour que vous nous disiez avec, ce que le slam représente pour vous. Voici les mots : Ouverture, vie, rencontre, vibration, vide.

Il parcourt depuis mon corps telle une VIBRATION, me fait par un stylo pratiquer dans le VIDE une OUVERTURE par laquelle j’ai fait et ferai de belles RENCONTRES: le Slam, c’est ma VIE, je le vis et j’en suis ravi.

 

Maintenant, si vous deviez librement décrire le slam, quels mots choisiriez-vous ?

Je choisirai les mots «poésie» et «liberté», car le Slam n’est qu’une nouvelle forme de faire de la poésie, forme dont la liberté est le moteur. Plus même que le poète moderne, le slameur est libre de tout créer, depuis le style jusqu’aux mots. Eh oui, le slameur est libre de créer même des mots, l’essentiel est qu’il arrive à se faire comprendre. Et donc, le Slam se trouve un “peu plus riche” que les autres formes de poésie en cela qu’il les englobe : voilà pourquoi je définis aussi le Slam comme une mosaïque de toutes les formes poétiques. La liberté, que recèle le Slam, lui confère son caractère urbain, lequel caractère est indu par le rap. Le Slam, est donc la rencontre de la poésie et du rap, c’est de la poésie urbaine.  Toutefois, ce n’est pas parce que le slameur est libre de créer jusqu’à ses propres mots qu’il doit faire fi de certaines règles conventionnelles.

 

Quelle est la nature de vos textes ? Sont-ils des conseils, des “armes” qui vous permettent de vous défendre des autres, ou carrément des expériences vécues ?

Mes textes se retrouvent dans presque toutes ces natures pré-citées. Parfois, ce sont des conseils, parfois, ce sont des expériences relatées. Et même quand c’est un conseil, je ne le donne que par rapport à une expérience que j’ai moi-même vécue. Aussi dans l’un de mes textes, je définis mes mots et donc mes textes comme des armes. Donc, mes textes se retrouvent dans toutes ces natures ou catégories.

 

Edem Ntsukpui sur scène

Avez-vous des slameurs ou d’autres artistes en général qui ont influencé votre manière d’écrire ou de slamer ?

Il y a évidemment beaucoup d’artistes qui m’inspirent et me sont des modèles.  Le principal n’est autre que le Français Grand corps Malade. J’ai écouté ce dernier pour la première fois en 2009. J’écrivais et faisais des scènes bien avant, mais l’écouter a été un tournant. J’ai compris qu’il fallait élever le niveau de tout ce que je faisais, donner plus de profondeur d’abord à mes textes.  C’est en fait “l’effet Grand Corps Malade” et je sais beaucoup d’autres slameurs, ici comme ailleurs, tiennent de cet effet.

« La scène est une plate-forme pas facile à monter, n’y arrivent que ceux qui font preuve de foi et volonté. La scène est une plate-forme à laquelle nombre veulent avoir accès, avoir un tel privilège ne dépend pas du nombre d’essais…» Avez-vous une idée de ces vers ? D’où viennent-ils ?

Ces vers sont extraits d’un de mes textes, le tout premier que j’ai enregistré et lancé sur les médias. J’ai écrit ce texte en 2010 et je l’ai titré Entrée sur scène. Entrée sur scène, parce qu’il devait être le tout premier texte que je devais lancer. J’avais prévu faire ce lancement un peu plus tôt, mais je l’ai fait que le 10 juin dernier. Ça a pris du temps parce qu’il me faillait finalement attendre, analyser le terrain pour savoir quoi lancer pour pouvoir impacter dans la multitude d’enregistrements du même genre qui ont déjà été lancés ici au Togo. Et l’accueil que le public a fait à ce son a été un des bons, ce qui ne m’a aucunement étonné ;  car, comme je viens de le dire, j’ai beaucoup analysé le terrain avant de lancer Entrée sur scène.

 

Dites-nous en quelques mots le message que vous véhiculez à travers ce titre “Entrée sur scène” ?

Dans Entrée sur scène, je décris mon parcours de 2008 à 2017, les péripéties que j’ai eu à traverser, dans la vive envie que j’avais de paraître aux yeux de tout le monde, en tant qu’artiste. Entrée sur scène, c’est aussi une mise en garde faite à ceux qui se lancent nouvellement et qui pensent que l’art en général et le Slam en particulier est le domaine de toutes les facilités.

 

Quels sont vos projets à court, moyen et long terme ?

À court comme à long terme,  Edem n’a qu’un seul projet : continuer de faire et surtout de mieux faire tout ce qu’il fait déjà.

Qu’est-ce qui est le plus gratifiant dans votre pratique de cet art ?

La chose la plus gratifiante, c’est quand je me retrouve à l’extérieur, sur des festivals ou des compétitions, en tant que représentant du Slam togolais. C’est tellement fort : tu te dis que tu dois honorer ton pays, faire les choses pour que ceux devant qui tu te trouves sachent qu’il y a du bon, de la matière à revendre, des talents au pays, et que toi tu n’es qu’un échantillon de tout ce qu’il y a comme talents. Tu dois faire toutes tes prestations dans l’idée qu’elles deviennent pour eux une invite à venir découvrir ton pays avec tous ces talents qu’il regorge.

Et le plus difficile ou le plus décevant ?

Le plus décevant ou le plus difficile, c’est quand tu te retrouves seul à tout faire,  c’est quand du grand public, seules 2 ou 3 personnes (et les mêmes de surcroît) quittent leur statut de simples observateurs pour devenir des accompagnateurs, alors qu’à ta dernière descente de scène, tu n’as pas su dénombrer les personnes qui t’ont approché, t’ont serré la main et t’ont dit «Continue, tu iras loin avec ce que tu fais ! »; c’est quand tu te retrouves à tout financer, depuis tes propres projets jusqu’aux projets que tu mènes dans l’intérêt des autres.

Alors, Edem Ntsukpui, parlez-nous de votre slogan: «Pour que jamais le Slam ne meure »

(Rires) En fait,  la version complète de cette phrase est: «Slameur pour que jamais le Slam ne meure». L’idée de cette phrase m’était venue en 2010 et c’est en fait un calembour que j’ai fait avec le mot “slameur”. Je voulais d’une phrase qui définisse mes actions,  et j’ai vite trouvé que je ne suis pas slameur pour que le Slam cesse d’exister mais plutôt qu’il vive à jamais, et donc pour que jamais le Slam ne meure. Cette phrase est donc devenue comme mon identifiant, je la répète où je vais et elle justifie et détermine toutes mes actions.  Au même moment, il y a beaucoup de personnes qui aiment cette phrase de par le monde, car en rien leurs actions ne diffèrent de celles que je mène ici au Togo.  Ces personnes sont aussi des slameurs, toutes leurs actions visent à faire vivre ou à pérenniser le Slam, et donc elles se retrouvent aussi dans cette phrase. Beaucoup m’écrivent d’un peu partout pour me manifester leur intérêt pour cette phrase et du désir qu’ils ont à l’utiliser aussi comme slogan dans leurs actions ou publications : car il s’agit avant tout d’une phrase qui proclame la survie du Slam, une pratique commune à tous les slameurs du monde. Je donnerai réponse à toutes ces personnes sous peu.

Votre mot de fin

Mes remerciements à L-frii.com, à tous ceux qui prendront le temps de lire cette interview,  à tous ceux qui m’accompagnent du mieux qu’ils peuvent, et à tous ceux qui se battent de par le monde…POUR QUE JAMAIS LE SLAM NE MEURE.